Damien Marchal

né en 1977
vit et travaille à Rennes, France


marchal_03

Damien Marchal, Garbage Truck Bomb, vue de l’exposition Garbage Truck Bomb [ou le bombardier du pauvre], La Criée centre d’art contemporain, Rennes, 2010

production : La Criée centre d’art contemporain, Rennes

photo : Benoit Mauras

marchal_02

Damien Marchal, Garbage Truck Bomb, vue de l’exposition Garbage Truck Bomb [ou le bombardier du pauvre], La Criée centre d’art contemporain, Rennes, 2010

production : La Criée centre d’art contemporain, Rennes

photo : Benoit Mauras

marchal_01-2

Damien Marchal, Garbage Truck Bomb, vue de l’exposition Garbage Truck Bomb [ou le bombardier du pauvre],La Criée centre d’art contemporain, Rennes, 2010

production : La Criée centre d’art contemporain, Rennes

photo : Benoit Mauras

Garbage Truck Bomb, 2010

structure bois sapin et aggloméré, téléphone portable, autoradio,
amplificateur, caisson de basse, enceintes, écran tactile, câbles
1017 x 240 x 362 cm

Garbage Truck Bomb est « un dispositif sonore interactif, pour un camion piégé et son détonateur ». L’installation se déploie dans l’espace à partir de l’ossature en bois d’un camion-poubelle réalisé à l’échelle 1. Ce véhicule dissimule un détonateur GSM cellulaire qui peut déclencher à tout moment une déflagration sonore et violente. Les bouteilles de gaz, éléments constitutifs d’attentats à la bombe, sont détournées pour être transformées en diffuseurs sonores. Leur modélisation en aggloméré de bois permet d’accroitre la résonnance des caissons de basses situés à l’intérieur. Damien Marchal déplace ici les codes du terrorisme pour nous donner à éprouver physiquement l’œuvre. 

Garbage Truck Bomb pose en son cœur la question du passage à l’acte et se fonde sur la prise de décision du public. Face à l’œuvre, le visiteur est en effet contraint de décider de sa position. Il a le choix d’activer ou non le dispositif de déflagration, au moyen de son téléphone personnel. A l’entrée, une borne numérique est prévue à cet effet. Après avoir enregistré son numéro, le visiteur recevra un message différé dans le temps de manière aléatoire qui lui permettra d’amorcer le système de mise à feu à distance. En ayant pris connaissance de cette information, le public peut décider d’apprécier le dispositif dans son ensemble ou se résigner à ne pas découvrir la déflagration, en considérant ce que représente l’acte et ses conséquences dans l’espace d’exposition.

Ce dispositif interactif nous amène à un questionnement sur la place du spectateur, le rapport à l’œuvre et aux lieux d’expositions. Sans la participation du public, l’œuvre reste incomplète. Le visiteur peut donc choisir de rester observateur ou de déclencher le détonateur, tel un activiste. En restant hors d’atteinte, il se positionne tel un commanditaire d’attentat qui assouvit un plaisir personnel, sans prendre en compte les victimes potentielles. Chacun est ainsi amené à déterminer son rôle.

Cette possibilité d’investissement renvoie également à la relation que nous entretenons à l’information, celle véhiculée par les médias et au contexte géopolitique. La voiture piégée est aujourd’hui une arme utilisée à l’échelle mondiale par des groupes activistes qui revendiquent leur idéologie par la force et la violence. L’exaction a pour but de faire parler d’elle. Les terroristes se soucient davantage de l’ampleur événementielle et des répercussions médiatiques de leur acte, que de leurs conséquences meurtrières. Dès lors, comment se positionne-t-on face à ces faits ? Comment traitons-nous cette information et comment considérer l’autre dans ce cas ?

Pour concevoir Garbage Truck Bomb, Damien Marchal s’est appuyé sur des faits historiques, énoncés dans l’ouvrage de Mike Davis, Petite histoire de la voiture piégée (Zone, 2007). Le premier relate l’un des plus importants attentats à la voiture piégée, perpétué contre les troupes américaines, lors de la guerre du Liban en 1983. L’explosion fut causée par un camion benne chargé de six tonnes d’explosif, qui causa la mort de centaine de soldats à l’aéroport de Beyrouth. Cet attentat eut un impact géopolitique majeur, celui de faire plier le gouvernement américain. Le deuxième extrait énonce les mesures de précaution prises par l’ambassade des Etats-Unis au Koweït pour interdire l’accès aux véhicules dans leur enceinte, à l’exception des camions-poubelles. Les kamikazes trouvèrent ainsi la faille… Mike Davis définit les caractéristiques du « bombardier du pauvre », comme base fondamentale du terrorisme moderne : « arme furtive, spectaculaire, bon marché, simple d’utilisation, aveuglément meurtrière, sûre, anonyme, la voiture piégée s’impose notamment comme l’arme idéale pour les groupuscules marginaux auxquels elle fournit la force de frappe sans rapport avec leur poids politique. » L’étude de ces données historiques et des moyens utilisés ont ainsi déterminé la forme de Garbage Truck Bomb.


VisuelExpoMarchalLaCrieeRVB

Exposition

Garbage Truck Bomb

Damien Marchal

du 30 avril au 18 juillet 2010